Maroc de la civilisation : Pour que les classes modestes et moyennes du monde rural ne soient pas oubliées

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Aziz Rebbah –  19 mai 2025


Après que Sa Majesté le Roi, que Dieu le préserve, a donné, au début du dernier Conseil des ministres, ses instructions strictes pour l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme d’urgence pour développer et reconstruire le secteur de l’élevage, le président du Conseil économique, social et environnemental, Abdelkader Amara, a présenté lors d’une conférence de presse tenue le mercredi 14 mai 2025 un rapport détaillé sur l’agriculture familiale et moyenne. Ce rapport inclut des indicateurs et des recommandations concernant les menaces et défis à traiter avec le sérieux requis.

Le rapport montre que ce type d’agriculture – également appelée agriculture vivrière, sociale ou solidaire – représente environ 70 % des exploitations agricoles, emploie 50 % de la main-d’œuvre agricole et joue un rôle central dans le développement rural.

Cependant, elle n’a pas été suffisamment et efficacement intégrée dans le processus de développement agricole. Elle est restée marginalisée par rapport aux grands projets agricoles, ce qui a entraîné une faible contribution à la valeur ajoutée agricole, à la sécurité alimentaire, à la stabilité de la population rurale et à l’attractivité du monde rural.

Le rapport identifie plusieurs insuffisances et obstacles, résumés comme suit :

Un soutien financier disproportionné par rapport à son importance et aux objectifs du plan agricole : seulement 14,5 milliards de dirhams d’investissements lui ont été alloués, contre 99 milliards pour l’agriculture à haute valeur ajoutée.

Un intérêt institutionnel faible, que ce soit en matière de conseil agricole, de soutien technique, de financement ou d’accompagnement, ce qui en fait le maillon faible des politiques agricoles actuelles.

Une vulnérabilité accentuée par les changements climatiques, la hausse des prix des intrants, les perturbations des chaînes d’approvisionnement, la fragmentation des terres et les difficultés de leur valorisation.

L’absence d’une organisation adéquate représentant ce secteur, encadrant ses acteurs et défendant leurs intérêts, capable de négocier au nom des agriculteurs.

L’inexistence ou l’insuffisance de systèmes de commercialisation, la domination des intermédiaires sur les marchés, et les spéculations au détriment des petits producteurs.

Pour remédier à ces lacunes, le rapport souligne la nécessité d’une meilleure reconnaissance, valorisation et intégration de ce type d’agriculture dans les politiques publiques, à travers les recommandations suivantes :

Faire de l’agriculture familiale petite et moyenne une priorité stratégique dans les politiques publiques locales, vu ses fonctions économiques et sociales.

Mettre en œuvre un plan d’action national tenant compte des spécificités territoriales et environnementales, visant à intégrer cette agriculture dans les chaînes de valeur, à améliorer son accès au financement et à valoriser son rôle dans la préservation des écosystèmes.

La développer pour qu’elle soit plus productive, intégrée et durable, en renforçant son intégration dans les chaînes de valeur, sa capacité de négociation sur les marchés, et sa contribution à la stabilité des populations rurales et à l’amélioration des revenus.

Prendre en compte les spécificités territoriales par des mesures de soutien allant au-delà de l’activité agricole, incluant le développement des infrastructures, la diversification des activités génératrices de revenus et un meilleur accès aux services publics.

Encourager les agriculteurs à adopter des pratiques agricoles durables telles qu’une irrigation efficiente, la diversification des cultures, tout en respectant les particularités écologiques de chaque région et en développant des cultures résilientes aux changements climatiques.

Repenser de manière urgente les chaînes de commercialisation, réguler et encadrer le rôle des intermédiaires pour limiter la hausse des prix des produits alimentaires.

Organiser les agriculteurs en coopératives et structures économiques, et créer des unités industrielles locales de petite taille pour valoriser les produits agricoles.

Renforcer le conseil agricole et étendre les services de soutien aux activités génératrices de revenus non agricoles.

Fournir des mécanismes financiers incitatifs adaptés, compte tenu de leur rôle dans la lutte contre la désertification, la préservation des sols et la sauvegarde du patrimoine naturel et culturel.

Aujourd’hui, une révision profonde de la politique agricole s’impose pour valoriser les acquis – certes positifs – mais qui n’ont pas atteint les objectifs escomptés, et aussi pour corriger les lacunes et les échecs dus à la gestion ou aux changements climatiques.

Cette révision devrait reposer sur un Observatoire national de l’agriculture et du développement rural, comprenant des indicateurs sur la sécurité alimentaire, le développement rural, la stabilité de la population, l’emploi, la gestion de l’eau, l’industrie agroalimentaire et agricole… Ce sont là des objectifs auxquels le pays s’est engagé, mais qui n’ont été atteints que partiellement !

Il est donc impératif d’engager cette révision pour changer de cap et améliorer la gouvernance, en adhérant sincèrement aux orientations royales avec le sérieux nécessaire.

C’est ainsi que notre pays préservera le plus important pilier de stabilité et de sécurité : la classe rurale petite et moyenne, garante de la famille et de la continuité générationnelle.

« Si Allah sait qu’il y a du bien dans vos cœurs, Il vous accordera quelque chose de meilleur. » – Vérité de Dieu.

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