Série « Maroc de la civilisation » Le développement équitable est possible grâce au respect des priorités et à la rationalisation . Troisième partie

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Aziz Rabbah
04 octobre 2025

 

Loin de toute attitude condescendante, fort de l’expérience et à la lumière des rapports des institutions de gouvernance, je peux affirmer qu’il est possible de réaliser davantage et de meilleure qualité, au bénéfice des catégories et des régions prioritaires, si nous respectons les priorités programmées et appliquons une bonne gouvernance. Cela passe notamment par la rationalisation et la préférence accordée à tout ce qui est marocain.

Parmi les pires manifestations d’une gouvernance faible – et l’une des principales causes des inégalités sociales et territoriales – figure le gaspillage des deniers publics. Les domaines de gaspillage sont nombreux et variés, ce qui impose l’accélération de la mise en œuvre de toutes les lois et mesures pertinentes. Les exemples sont multiples :

  • Routes : de nouvelles routes sont construites ou des anciennes élargies, mais avec parfois des bordures et des ornements superflus, ou des matériaux coûteux ; il arrive aussi que des matériaux encore solides et utilisables soient remplacés inutilement.

  • Éclairage public : des budgets supérieurs aux besoins sont alloués, avec des poteaux coûteux, même dans de petites rues ou villages. Parfois, les lampadaires sont installés à intervalles trop rapprochés, doublant les coûts ; des équipements encore fonctionnels sont écartés au lieu d’être simplement entretenus.

  • Places, parcs et équipements publics (sociaux, culturels, sportifs) : indispensables certes, mais souvent réaménagés avec des coûts excessifs liés à des ajouts non nécessaires. Si ces fonds étaient redirigés vers des quartiers sous-équipés, leur impact serait bien plus profond pour les citoyens.

  • Bâtiments administratifs et de services (ex. transports) : construits ou rénovés avec excès (murs en verre, marbre, éclairages luxueux, éléments secondaires), ce qui gonfle le coût initial et ajoute des charges d’entretien élevées.

  • Festivals et fêtes : parfois organisés à des coûts très élevés, même dans des communes rurales pauvres ou des villes aux quartiers dépourvus de services essentiels. Des activités culturelles, sportives et artistiques moins coûteuses pourraient avoir le même impact, tout en valorisant les potentialités locales.

  • Achats et équipements : véhicules, machines, ordinateurs, imprimantes et autres équipements de bureau coûteux ou inutiles. Exemple frappant : des communes rurales qui achètent des 4×4 sans réelle nécessité.

  • Dépenses de fonctionnement : budgets élevés consacrés à la maintenance, au carburant, aux impressions, aux voyages, aux publicités, au soutien d’associations et de médias. Bien qu’importantes, ces dépenses sont souvent exagérées.

Chaque année, des milliers de marchés publics sont lancés par les ministères, établissements, entreprises publiques et collectivités territoriales, mobilisant des milliards de dirhams. Sans exagérer, se concentrer uniquement sur l’essentiel permettrait de réduire le budget de manière significative, ouvrant la voie à la satisfaction de besoins supplémentaires dans les mêmes secteurs et régions, à la réduction des inégalités territoriales, ou encore au soutien de l’éducation, de la santé et de l’emploi.

La rationalisation – et le patriotisme sincère – exigent aussi de donner la priorité aux entreprises nationales, aux petites structures, aux coopératives, aux produits locaux et à l’artisanat. Cela réduirait les importations, limiterait le déficit commercial, renforcerait les acteurs nationaux et soutiendrait l’industrie et les métiers marocains. Le contraire ne ferait qu’entretenir le gaspillage et l’abandon de ce qui est marocain.

La rationalisation passe également par l’exploitation des nombreux espaces libres (trottoirs, places, parcs, équipements et bâtiments publics) pour y créer des commerces, des services ou des expositions permanentes d’artisanat. Une telle approche générerait des revenus permettant de financer la maintenance et de récupérer une partie de l’investissement, tout en créant des emplois dont le pays a un besoin urgent.

Le développement équitable n’est pas un rêve éphémère ni un slogan creux, mais le fruit d’une volonté sincère et d’une gestion rationnelle. Si nous respectons les priorités, orientons bien les deniers publics et donnons la primauté à ce qui est marocain – dans l’homme comme dans le produit – chaque dirham pourra laisser une empreinte lumineuse dans la vie du citoyen. C’est alors que s’affirmera le « Maroc de la civilisation » dans sa plus belle expression : un Maroc de dignité, de justice et d’équité.


 


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